Conférence sur les mécanismes de renvoi devant la CPI
Plusieurs professionnels du monde juridique et judiciaire ont foulé le sol de ISPRIC afin de partager avec générosité leurs attrayantes expériences. Nombre d’entre eux ont occupé le pupitre de la salle de conférence face aux étudiants de la Clinique juridique ISPRIC.
Lundi 05 Juin 2023, c’était le tour de Maitre Mayombo KASSONGO, avocat congolais à la Cour Pénale Internationale, d’entrer dans la danse à travers un exposé sur son livre intitulé « Renvoi d’une situation devant la cour pénale internationale ».
Me KASSONGO se distingue par son parcours multidimensionnel. En plus de sa fonction d’avocat, il est aussi un enseignant-chercheur, dont les travaux tournent autour du droit international pénal, des droits de l’homme et du contentieux administratif.
Quelle est l’idée à partir de laquelle ce livre a germé ? Cet essai a été écrit pour faire face à une légion d’interrogations qui hantent les spécialistes de droit international pénal. « Il y a des questions qui se posent. Par exemple le mécanisme de saisine, par exemple le sort des victimes, par exemple comment revenir vers la justice interne lorsque la justice internationale n’a pas donné satisfaction. Tout l’essentiel de ce livre pour pouvoir interroger les scientifiques, les praticiens », a expliqué l’avocat congolais.
En bon pédagogue, Me KASSONGO commencera son exposé par la clarification des concepts servant de soubassement à ce livre. Il soulignera que terme « renvoi » provient du verbe renvoyer. Mais, c’est surtout l’acception sportive du mot qui intéresse l’exposant, à savoir transmettre « une balle avec une certaine maitrise. » Faire parvenir un ballon avec dextérité à une cible.
Ensuite, il touchera au mot « situation » qui n’est autre que les faits criminels lors des conflits armés. Ainsi, le « renvoi d’une situation » est l’acte par lequel un Etat transmet à la juridiction internationale un dossier d’accusation contre les auteurs des crimes en situation conflictuelle.
Les mécanismes du renvoi
Pour saisir la Cours Pénale Internationale (CPI), les Etats doivent, au préalable, être signataires du traité de Rome. Toutefois, les Etats non membres peuvent également effectuer une saisine de la CPI, s’ils reconnaissent les compétences ainsi que le bien-fondé de la juridiction internationale. Comme, ce fut le cas de la Côte-d’Ivoire pendant l’affaire Gbagbo lors de la violence électorale en 2012. L’Etat ivoirien, bien qu’il ne soit pas signataire du traité de Rome, a tout de même accepté que la CPI juge des individus poursuivis pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
Lorsque des forfaits abominables sont perpétrés, les populations expriment un grand besoin de justice. Un sentiment punitif se manifeste venant d’elles. Face à une telle situation hostile à l’impunité, difficile que l’Etat se taise. Il peut ainsi décider de renvoyer la situation (les crimes conflictuels) à la Cour Pénale Internationale. S’il estime que les ressources humaines ou les compétences requises lui font défaut.
Quant à la forme du renvoi, l’avocat de la CPI a fait remarquer qu’elle se présente tout simplement comme une lettre dans laquelle un Etat correspond avec le Procureur de la CPI pour lui demander d’ouvrir des enquêtes contre telles personnes accusées d’être instigatrices de crimes sur son territoire. Pendant le chaos d’un conflit.
Après avoir pris connaissance du contenu de cette missive, le Procureur, à son tour, accuse, enquête avant de lancer des poursuites (les mandats d’arrêt). Il accumule, les éléments d’enquête pour ouvrir un procès. Mais, avant, il demande à un juge de la Cour de valider sa démarche. Autrement dit, il présente au juge un document détaillant les charges retenues contre les individus incriminés.
Après cette étape, les juges de la CPI confirment les charges, et lancent un mandat d’arrêt international pour arrêter et transférer les cerveaux des ces crimes devant la Juridiction Internationale.
Comme dans les procès ordinaires, la CPI offre des séances où on assite à la confrontation des éléments de preuve. L’accusation et la défense, toutes griffes dehors, restent campées sur leur position. Elles se défendent avec becs et ongles. Les séances sont houleuses. Surtout, s’il s’agit des contre-interrogatoires, c’est-à-dire l’interrogatoire d’un témoin ou d’un accusé par la partie adverse.
A la fin de la conférence, l’avocat KASSONGO laissera entendra sa satisfaction scientifique. Une grande joie pour lui de partager ses connaissances sur le droit pénal international avec les étudiants, a-t-il déclaré.
Quant à cette initiative de la Clinique juridique, il la jugera très pertinente. « Les étudiants doivent compléter leurs connaissances théoriques, en allant vers la pratique. Et c’est le sens même de ma démarche pour apporter mes connaissances pratiques à ces étudiants. Cela me rend fier », a-t-il ajouté.